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À l'image de notre univers

Je dormais dans un sommeil profond, tel un enfant se sentant en sécurité dans le cocon familial. Rêvais-je ou étais-je plongé dans l’histoire que mon père me lisait ? Un nuage noir et dense plombait le ciel. Un autre jour, il m’aurait fait peur, mais ce soir-là, j’étais émerveillé. La voix rêveuse de mon père qui racontait notre histoire devenait de plus en plus faible… Le nuage noir était ma mère, notre mère, la mère de notre communauté.



Les Diné, du nom que les Navajos se donnent, bénéficient d’une mémoire collective leur rappelant la naissance. La nature fait partie de leur existence, comme un membre cher de leur famille. Les êtres sacrés naissent de la terre. Le mythe d'origine des Diné associe les quatre directions aux couleurs symboliques, le blanc pour l’est, le bleu pour le sud, le jaune pour l’ouest et le noir pour le nord. À l’aube du temps, le monde était comme une épaisse laine noire, sans forme avec quatre coins distincts d’où sont apparus quatre nuages, noir, blanc, bleu et jaune. Ils contenaient les éléments nécessaires à la création de ce premier monde, une palette de couleurs mythologique qui depuis égaie les peintures.



Les communautés tribales de l'Inde : Gond, Bhuiya et Juang du plateau central, ou Madiga du sud ont une histoire similaire du commencement de la vie :


D’après la mythologie, « Avec la tête à l’est, la queue à l’ouest, les flancs au sud et au nord, la puissante bête abrite l'ensemble de l’univers dans son ventre et tient le ciel sur son dos. Ses yeux brillent comme le soleil, de ses narines sort le vent, son cœur est la lune. Son nombril représente la naissance et la mort, des trombes d'eau sortent de son sexe ».

Les éléments naturels tiennent une place importante dans la compréhension de la naissance humaine et de l’Univers. C'est une conviction profonde que chaque personne a été créée à l'image d’un vaste univers. Chaque être est indissociable de toutes les autres créations. L’harmonie de vie continue toujours…


Les Batak, une tribu autochtone des Philippines, croit qu'une énergie unique illumine le monde naturel animé ou inanimé. C'est la même énergie qui anime leur conscience. Pour eux, la terre, la mer, le ciel et les éléments de la nature n'appartiennent à personne. Leur éthique sociale est fondée sur le partage.


Aux extrémités opposées de la terre, dans les temps préhistoriques, les différentes cultures autochtones ont établi des mythes de créations similaires, qui ont tous affirmé un lien empathique et organique avec l’Univers, en unité avec la nature.





Il y avait un énorme baobab au milieu de notre village. Nous avions l'habitude de nous asseoir autour de cet arbre, nos pieds se touchaient alors que nous formions un cercle autour de l'arbre. Le baobab était le grand-père de notre village. Mes parents étaient venus sous l'arbre avec le désir de concevoir ma naissance. Les villageois s’étaient réunis sous l'arbre pour me nommer. Je grandissais en croyant que l'arbre était ma famille. Nous formions une seule grande famille, nous tous, avec la forêt.


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Ubuntu

Le président Obama a utilisé le mot Ubuntu pour faire l'éloge de Nelson Mandela. Les zoulous d'Afrique disent ubuntu ngumuntu ngabantu, je suis parce que nous sommes, je suis humain parce que j'appartiens. L'identité collective de la tribu est la volonté de s’entraider et la capacité de penser à l'autre avant soi-même. Chaque individu est un acteur spécifique d’un réseau empathique. Ubuntu apporte une attitude de gratitude, car je suis grâce à ce que tu es. La tribu croit en une vie harmonieuse, basée sur l’entraide entre les hommes, les végétaux, les animaux et les éléments.


Les aborigènes d'Australie retracent leurs histoires en traçant des parallèles entre les étoiles et leurs trajectoires culturelles sur la terre. Leurs songlines sont l'expression d'un très ancien code de mémoire collective, des histoires orales gravées sur les murs des grottes préhistoriques, et de nos jours, peintes sur toile.


Depuis que ma mémoire existait, depuis des milliers d'années, je me souvenais des histoires chantées. Ces Songlines retraçaient les voyages de mon peuple ancestral. Des esprits anciens qui créèrent la terre et ses habitants : les plantes, les animaux et les humains. Mes ancêtres peignaient les chansons en traits codifiés qui devinrent depuis notre façon de communiquer.





Les peuples autochtones constituent des groupes culturels distincts avec leurs structures sociales spécifiques, qui partagent des liens ancestraux collectifs avec les terres et les ressources naturelles où ils ont vécu. Leurs identités sont intrinsèquement liées aux ressources naturelles de la terre qu'ils habitent. Elles forment le berceau de leurs traditions culturelles, fournissent leurs moyens de subsistance, ainsi que leur bien-être physique et spirituel.

Les termes génériques ‘indigène’ ou ‘autochtone’ caractérisent des peuples qui :


- S’identifient en tant que peuples au niveau individuel et sont acceptés par leurs communautés en tant que membres.

- Ont une continuité historique avec les sociétés précoloniales.

- Ont un lien fort avec les territoires et les ressources naturelles qui les entourent.

- Entretiennent et développent leurs environnements ancestraux.

- Ont leurs propres systèmes sociaux, économiques ou politiques

- Ont une langue, une culture et des croyances distinctes


Le terme « autochtone » est devenu le terme générique politiquement correct au cours de ces dernières années. Dans certains pays, il peut y avoir une préférence pour des termes tels tribus, premiers peuples ou premières nations, indigènes, aborigènes, groupes ethniques, adivasi, janajati... D’autres termes professionnels et géographiques comme chasseurs-cueilleurs, nomades, paysans, montagnards, ont également coexisté, et sont plus descriptifs que les identités. Dans de nombreux cas, le fait d'être désigné « autochtone » peut avoir des connotations négatives. Avec le temps et en raison de la ségrégation sociale qu’elle implique, certaines communautés rejettent ces appellations et peuvent choisir de ne pas révéler leur origine.


Il y a environ 476 millions de personnes appartenant aux peuples autochtones dans le monde, dans plus de 90 pays. « Bien qu'ils représentent plus de 6% de la population mondiale, ils représentent environ 15% des personnes extrêmement pauvres. Alors que les peuples autochtones possèdent, occupent ou utilisent un quart de la superficie mondiale, ils préservent 80% de la biodiversité mondiale. Ils gardent des connaissances et des expertises ancestrales vitales sur la manière d’adapter, d’atténuer et de réduire des risques liés au climat et aux catastrophes. » (Rapport de la Banque Mondiale, 2020)


songlines, peinture aborigène Australie
Pointillisme d'aborigène

Les communautés autochtones ont un lien indélébile et organique entre le mythe de leur création et l'harmonie qui les imprègne sur terre. Leurs cultures sont des sauvegardes naturelles de l’environnement qu’elles ont utilisées de manière durable au cours des derniers siècles, d’aussi loin que la mémoire historique existe.






Ces communautés ont vécu harmonieusement depuis toujours, dans la masse continentale de l'Australie, de l'Asie, de l‘Europe, de l'Afrique et dans les profondeurs des forêts amazoniennes jusqu'à la toundra des pôles. Cette vie reculée, dans les parties les plus inaccessibles du monde, a certainement contribué à leur survie.


Alors, qui suis-je ? Je suis un artiste autochtone, né et élevé dans l’une de ces communautés. Je suis Diné, Gond, Arawak, Massaï et beaucoup d'autres. Ce sont nos histoires que je vous dévoile. Revenez souvent car je vous raconterai nos contes traduits en peintures et en sculptures, nos histoires ancestrales transmises sous le ciel étoilé, de génération en génération, des histoires de forêts, de soleil et de lune, de longs voyages dans les montagnes et bien d’autres... mais cela sera pour une autre fois. Nous ne faisons que commencer...





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